Les platanes de la rue St Domingue seront abattus. Le chancre coloré veut leur peau et la ville de Nantes fait face à une nouvelle menace pour son patrimoine arboré.Un foyer de chancre coloré a été confirmé rue Saint-Domingue sur l’Île de Nantes, déclenchant des mesures d’abattage sanitaire d’urgence pour protéger près de 4000 platanes de la métropole. Pour situer un peu, la rue Saint-Domingue, c’est au sud-ouest de l’île de Nantes, là où se trouvent le Floride, lieu mythique des noctambules nantais et le Karting.
Une maladie foudroyante détectée six ans après le dernier foyer
Le 1er septembre dernier, les services de Nantes Métropole ont alerté la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF) sur la présence suspecte de symptômes sur un platane de la rue Saint-Domingue, dans le secteur de l’Île de Nantes. Les analyses réalisées lors du contrôle officiel ont confirmé les craintes : l’arbre est bien atteint par le chancre coloré du platane, une maladie végétale parmi les plus redoutées pour cette espèce.
Cette découverte marque le retour de la maladie dans la région après six années d’absence. Le dernier foyer avait été identifié en 2019 aux abords du marché de Talensac, également sur la commune de Nantes. La réapparition du champignon soulève des inquiétudes légitimes quant à la préservation du patrimoine végétal métropolitain, qui compte près de 4000 platanes répartis sur l’ensemble du territoire nantais.
Le chancre coloré : une condamnation à mort pour les platanes
Le chancre coloré est causé par un champignon microscopique nommé Ceratocystis platani. Son mode de propagation explique sa dangerosité : il pénètre dans l’arbre par les blessures du tronc, des branches ou des racines, mais peut également se transmettre par la soudure naturelle entre les systèmes racinaires de platanes voisins. Une fois installé, le champignon colonise les vaisseaux conducteurs de sève, provoquant leur obstruction progressive.
Les symptômes sont caractéristiques : des nécroses brun-rouge à violacées apparaissent dans le bois, d’où le nom de « chancre coloré ». L’arbre commence alors à dépérir, son feuillage se dessèche, et sa mort devient inéluctable dans un délai de deux à cinq ans. À ce jour, aucun traitement curatif n’existe pour sauver un platane contaminé.
Il est important de préciser que cette maladie est strictement spécifique au platane : elle ne représente aucun danger pour les autres espèces végétales, ni pour l’homme ou les animaux.
Des mesures radicales imposées par la réglementation
Face à la gravité de la situation, le chancre coloré fait l’objet d’une classification en « maladie de lutte obligatoire ». Cette qualification impose la mise en œuvre immédiate de mesures sanitaires strictes, encadrées par un arrêté préfectoral publié le 17 octobre 2025.

Le protocole de lutte est sans appel : tous les platanes situés dans un rayon de 50 mètres autour de l’arbre infecté doivent être abattus dans les plus brefs délais. Cette zone d’abattage préventif, bien qu’elle puisse sembler drastique, constitue le seul moyen reconnu d’enrayer la propagation du champignon. Les services de l’État collaborent étroitement avec ceux de Nantes Métropole pour orchestrer ces opérations délicates.
Les mesures ne s’arrêtent pas à l’abattage. Le périmètre infesté fait l’objet de restrictions sévères : toute sortie de terre est interdite pour éviter la dispersion du champignon, qui peut survivre plusieurs années dans le sol. À l’échelle de l’ensemble de la commune de Nantes, des obligations de nettoyage et de désinfection des outils sont désormais en vigueur pour tous les intervenants travaillant sur ou à proximité des platanes.
Un dispositif de surveillance renforcé
Pour prévenir de nouvelles contaminations, un système de déclaration préalable a été instauré. Tous les travaux susceptibles de blesser les platanes – qu’il s’agisse d’interventions sur les troncs, les branches ou d’opérations de fouille à proximité des racines – doivent être déclarés au moins quinze jours avant leur réalisation. Cette mesure vise à garantir que les précautions sanitaires appropriées soient systématiquement prises.
Cette vigilance accrue s’explique par le caractère particulièrement virulent du champignon. La moindre blessure peut constituer une porte d’entrée pour Ceratocystis platani, et les outils contaminés représentent l’un des principaux vecteurs de transmission entre arbres. Un simple sécateur ou une tronçonneuse mal désinfectés peuvent propager la maladie d’un bout à l’autre d’une ville.
Un patrimoine végétal sous haute surveillance
L’enjeu dépasse largement le sort de quelques arbres rue Saint-Domingue. Avec près de 4000 platanes, Nantes possède un patrimoine arboré considérable, façonné au fil des décennies. Ces arbres majestueux participent à l’identité paysagère de la métropole, offrent de l’ombre en été, améliorent la qualité de l’air et contribuent à la régulation thermique urbaine.
La perte d’un alignement entier d’arbres adultes représente un préjudice écologique et paysager qui nécessitera des décennies pour être compensé. Les autorités devront réfléchir à des stratégies de replantation privilégiant la diversité des essences, pour éviter qu’une future épidémie ne décime à nouveau le patrimoine arboré métropolitain.
Que faire en cas de suspicion du chancre coloré ?
Les habitants de Nantes sont invités à rester vigilants et à signaler tout symptôme suspect sur les platanes de leur quartier : dessèchement brutal du feuillage, écoulements colorés sur le tronc, ou nécroses visibles sur l’écorce. Les signalements peuvent être adressés à la DRAAF par courriel (sral.draaf-pays-de-la-loire@agriculture.gouv.fr) ou par téléphone (02 41 72 32 32).
Cette collaboration entre services publics et citoyens constitue un maillon essentiel du dispositif de surveillance. Plus une contamination est détectée précocement, plus les chances de circonscrire le foyer et de limiter les abattages sont élevées.
La bataille contre le chancre coloré du platane s’annonce longue et exigeante. Elle requiert la mobilisation de tous les acteurs pour préserver ce qui peut encore l’être du patrimoine arboré nantais, tout en préparant l’avenir par des choix de gestion et de plantation plus résilients.
Pour plus d’informations sur le chancre coloré.
Visuels : © OliBac et Google street.
