Tribune Libre

Inclusion : entre théorie et pratique

Des enseignants du collège Jacques Brel de Guérande alertent sur la situation des enfants avec handicap qui ne sont pas comptabilisés dans les effectifs. Et nous vivons parfois de vraies situations de souffrance scolaire.

Inclusion : entre théorie et pratique. Un cas d’école au collège Jacques Brel de Guérande.

Le texte de loi de 2005 s’évertue à dire que l’inclusion des élèves à handicap dans les écoles, les collèges et les lycées doit être une priorité : « Il faut insister sur les moyens à donner et surtout comptabiliser ces élèves dans les effectifs ». Pourtant, le parcours pour les familles de ces enfants est un vrai marathon. C’est grâce à leurs demandes que des classes ouvrent.

Mais il faut savoir que les structures spécialisées ferment ou ne s’ouvrent pas, et que c’est beaucoup plus intéressant financièrement d’inclure des élèves. Si certains enfants doivent davantage être inclus, cela doit se faire avec des moyens financiers et humains, ce qui est loin d’être une réalité. De plus, pour que tout se passe au mieux, il est conseillé que l’inclusion fasse partie d’un projet d’établissement pour permettre aux équipes de se préparer et d’apprendre à travailler avec les différents partenaires de ces dispositifs (AESH [accompagnant des élèves en situation de handicap], Professeur spécialisé).

Au collège Jacques Brel, les enseignants ont été les derniers informés de l’ouverture d’une classe ULIS à la rentrée prochaine. Ainsi, alors que depuis 3 ans des demandes de moyens ont été faites à chaque conseil d’administration (l’établissement fait partie des collèges avec la plus forte moyenne élèves par classe dans le département), le collège a été choisi pour l’ouverture d’une ULIS* (troubles du langage).

Le manque de moyens humains est une question récurrente

Depuis la fin avril, les collègues se sont réunis et ont été reçus en audience à l’Inspection académique pour demander des moyens pour accueillir ces nouveaux élèves à besoins particuliers mais aussi pour obtenir de meilleures conditions pour les élèves déjà présents au collège et qui sont pour la plupart 30 par classe. Il faut aussi rappeler que le collège Jacques Brel est un établissement construit dans les années 70 et que le personnel enseignant comme les agents se plaignent des locaux exigus (réfectoire, cuisine, sanitaires, salles de classe…).

Le manque de moyens humains est une question récurrente pour les services publics car rien n’a été revu à la hausse depuis des années ni même pendant la crise sanitaire. Pendant cette année scolaire certaines salles de classe n’étaient nettoyées qu’une fois par semaine. Dans les collèges une PSY-EN [psychologue de l’éducation nationale] n’est présente que 5h par semaine pour 600 élèves, une infirmière s’occupe de ces 600 élèves ainsi que des enfants des écoles du secteur.

L’année scolaire s’est donc terminée au collège dans un climat tendu car les enseignants ont du commencer à préparer la rentrée avec de nombreuses inconnues. Le professeur spécialisé attribué pour cette classe n’est toujours pas nommé et les élèves ont du être répartis dans des classes sans aucune connaissance de leur dossier. Les enseignants ne sont pas formés pour recevoir ces nouveaux élèves, même s’ils connaissaient déjà ce que représente l’inclusion, car le collège accueille depuis quelques années un dispositif ITEP [institut thérapeutique éducatif et pédagogique]. Ce type de dispositif permet à certains enfants d’être en inclusion dans les cours, mais sans toutefois être comptabilisés dans les effectifs.

Un manque de considération patent

L’éducation nationale crée des dispositifs individualisés, comme les PAP [plan d’aide individualisée], qui doivent permettre la prise en compte des difficultés de tous mais comme bien souvent, ce sont les enseignants qui doivent jongler avec des tâches administratives de plus en plus importantes et des classes à effectifs chargés.

Les trois courriers des enseignants aux directeurs académiques adjoints restent sans réponse. Pour les professeurs, la conclusion de leurs échanges révèle un manque de considération qui confine au mépris. Manque de considération du corps enseignant qui prendra en charge les élèves, manque de considération des élèves actuels et leur famille qui n’ont pas connaissance du projet, manque de considération des élèves ULIS et de leurs familles qui ne connaissent pas les conditions dans lesquelles leurs enfants vont être accueillis.

AESH : accompagnant des élèves en situation de handicap.
ULIS : unité localisée pour l’inclusion scolaire.
TSLA : troubles spécifiques du langage et des apprentissages.
ITEP : institut thérapeutique éducatif et pédagogique.
PAP : plan d’aide individualisée.

Inclusion : entre théorie et pratique est un article rédigé par des enseignants du collège Jacques Brel de Guérande. Nous donnons la parole à toutes et tous dans le respect des autres dans notre rubrique Tribune Libre.

Visuel ©education.gouv.fr

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